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Mohamed Bourouissa “Urban Riders” au Musée d’Art Moderne de Paris

Louise Lemesle 20 avril 2018
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Mohamed Bourouissa, Demain c’est loin, 2017 — Tirages argentiques couleur et noir et blanc sur plaques de métal, carrosserie, peinture, aérosol, vernis, couvertures et sangles Courtesy de l’artiste et kamel mennour, Paris/London © Adagp, Paris, 2017

Mohamed Bourouissa, l’un des artistes majeurs de sa génération, présente, pour la première fois, une exposition personnelle au Musée d’Art Moderne de Paris. Un projet articulé autour de « Urban Riders », sorte de western contemporain urbain. À voir jusqu’au 22 avril.

Plasticien franco-algérien, né à Blida en 1978, Mohamed Bourouissa a été remarqué au New Museum à New York (Younger than Jesus, 2009). S’il a participé à une exposition collective au Palais de Tokyo et au Musée d’Art moderne de Paris (Dynasty, 2010), c’est sa première exposition individuelle en France. Un projet qui s’appuie sur une collaboration féconde avec la communauté des Urban Riders. On y retrouve les principes de son travail : l’observation de la société par ses marges et les pratiques collectives, où la dimension humaine occupe une place centrale.

Depuis le lancement d’Urban Riders, l’image d’un cavalier noir sur son cheval blanc tapisse les espaces publicitaires des boulevards parisiens. Voilà une bien belle façon d’entrer dans l’univers de cet artiste ! Celui-ci a rassemblé un corpus d’œuvres pour raconter le Horse Day, un évènement durant lequel des cavaliers d’un quartier défavorisé ornent leur chevaux de parures plus fantasques les unes que les autres. Ces derniers paradent et s’affrontent devant un jury pour remporter un prix artistique, le Prix du Horse tuning.


Témoigner d’un partage culturel

Le projet Horse Day émerge en 2013, après la découverte des écuries associatives de Fletcher Street, dans la quartier de Strawberry Massion, à Philadelphie. Ce centre équestre urbain accueille les jeunes du quartier, ainsi que des chevaux abandonnés. Il inspire à Bourouissa un projet double : la réalisation d’un documentaire relatant l’élaboration du projet et le déroulement d’un évènement public qu’il veut créer de toutes pièces, à mi-chemin entre le tuning et la course équestre.

L’artiste échange alors avec la communauté d’écuyers du quartier. C’est un travail collectif qu’il s’est employé à diriger en décidant de réaliser un film produit par tous, sur un évènement créé ensemble. Artistes et cavaliers ont donc collaboré à la réalisation de costumes, à la customisation de selles, ainsi qu’à l’organisation d’une journée consacrée au cheval. Mais c’est une dimension bien supérieure que Bourouissa cherche à mettre en avant, en impliquant cette communauté dans la réalisation de son film.


Retracer le processus créatif

Bourouissa fait partie d’une génération qui dépasse la simple exposition du résultat d’un processus créatif. Il prend plutôt le parti de raconter les fondements de son projet, son élaboration, sa production. Ce qui fait œuvre ici, c’est l’intention, la collaboration entre le plasticien et les cavaliers, davantage que le résultat concret.

Grâce à la richesse de son langage plastique, Bourouissa raconte donc l’histoire du Horse Day : croquis préparatoires, story board, sculptures ou encore aquarelles sont les appuis de sa réflexion lui ayant permis d’imaginer cet évènement.

Son film quant à lui, produit de manière collective avec la communauté locale, retrace les préparatifs et le Horse Day, lui-même. Ce qu’il reste de cette aventure sont des souvenirs:

les installations des costumes des chevaux ou encore des carrosseries de voitures devenues supports de photos de cette communauté noire américaine, prises par l’artiste.




Questionner une réalité sociale

L’artiste contemporain invente, avec les Urban Riders, un nouveau style, celui du western contemporain. Il déconstruit les stéréotypes du genre et introduit l’identité de cette communauté noire à son histoire. Il y interroge la place des afro-américains dans ce genre cinématographique et met en place un dialogue sur la couleur de peau des héros américains.

Ces cavaliers aux allures de gangstas déambulent dans la ville avec leur montures, entre terrains vagues et building modernes de la City. En montrant ces images, Bourouissa déconstruit les clichés du cowboy des grandes plaines et d’un milieu hippique que l’on veut traditionnellement upper. Eux, s’inscrivent dans l’héritage des Buffalo Soldiers, fiers de leur identité. Ce sont les Urban Riders.


Explorer les marges de la société

Le travail de Bourouissa se distingue par sa dimension humaine. Cet artiste nous montre les réalités et les déséquilibres de la société, ce qui nous différencie et ce qui nous rend unique. Mais il parle aussi de ce qui nous rapproche et de ce que nous partageons. Il dévoile ce que l’on a tendance à ne pas regarder, nous fait redécouvrir ce qui se trouve sous nos yeux.

En somme, il nous réapprend à voir la beauté dans ce quelle a de simple. La beauté, dans sa grandeur, car elle émane de partout : de la diversité des hommes et de leur identité, de celle des communautés et des savoir-faire, des activités quotidiennes, mais aussi du partage et des échanges, de ce qui les pousse à se réunir.

Ainsi, avec Urban Riders, Bourouissa démontre, une fois de plus, que l’observation d’un microcosme, à travers ses pratiques collectives et jusque dans ses marges, participe de la beauté du monde.

Louise Lemesle

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